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MARTIN DÉSILETS

Les agglomérations

Exposition
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© Martin Désilets, Galerie B-312, 2006.
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La Galerie B-312 accueillera du 9 septembre au 14 octobre 2006 Les agglomérations de Martin Désilets. L’œuvre trame ensemble des impressions numériques de photographies prises en 2001 et 2002 à Beyrouth et ses environs, des cartes postales du Liban ajourées selon des motifs décoratifs orientaux, et des petites peintures faisant référence à des moments charnières de la modernité ou se résumant parfois à une texture monochrome. L’artiste en a dit ceci :« Les agglomérations est inspirée d’un territoire marqué par les stigmates de la violence et de la guerre : Beyrouth et le Liban. Depuis le début de la réalisation de ce projet, et dans sa facture même, je me suis imposé une règle stricte, comme un interdit : ce travail d’agglomération doit exclure l’usage d’un seul élément du langage plastique : la ligne verte. Durant la guerre civile à Beyrouth, c’est ainsi que l’on désignait la ligne de démarcation entre le côté ouest et le côté est de la ville. La violence et la guerre sont donc évoquées ici surtout à travers une présence-absence, ou plus précisément par une absence de toute référence directe… et par la soustraction de toute ligne verte, autant dans les photographies couleurs que dans les éléments peints. D’un point de vue philosophique, il y a dans ce geste à la fois toute la force symbolique de l’art, en même temps que son incapacité – et la mienne – à induire un changement (dans le) réel… sa terrible vacuité. »

L’œuvre ne témoigne pas, ne juge pas, ne voile pas non plus ce qu’elle montre derrière un masque de beauté ou derrière un quelconque formalisme. Cette œuvre est plus simplement un poème, c’est-à-dire un seuil au-delà duquel rien n’est comme on pensait.

Dans Les agglomérations, les formes, les motifs, les couleurs, les textures s’interpellent, se répondent, riment entre elles. Il y règne un ordre, une harmonie même, dont le plaisir intellectuel se délectera. Et puis, le bâti chancelle, les liens cèdent. Rien ne s’effondre cependant. Au contraire, l’œuvre se consolide. Le sens qu’on croyait lui avoir trouvé perd sa logique devant une logique plus logique encore. Osera-t-on reconnaître là ce qu’en son temps Romain Gary avait décrit ainsi : « Tant qu’on ne reconnaîtra pas que l’inhumanité est chose humaine, on restera dans le mensonge pieux » (Les Cerfs-Volants1980) ?

JEAN-ÉMILE VERDIER